Dans mon jardin

J’ai habité la même petite cabane du fond de la vallée quasiment toute ma vie. Mes parents s’y sont installés lorsque j’avais un an, et on peut également retirer l’année dernière que j’ai passé à Toulouse. Autrement, c’est cette exacte chambre depuis laquelle je vous écris qui m’a vue en couches, a été témoin de mes bonnes notes de primaire, mon entrée très embarrassante dans la puberté, mon premier amoureux au lycée.

Bref, mon chez-moi, je le connais par cœur. Et je l’adore.

Les choses auraient été différentes si j’avais habité un appartement ou une maison collée-serrée à celles des voisins (j’aurais plié mes bagages dès mes seize ans) (enfin non, je ne suis pas assez débrouillarde).

Mais là où je vis, c’est une vaste propriété familiale, laissée à l’état sauvage au fil des années. A ma fenêtre, il y a la forêt et la rivière qui gazouille non-stop. Elle est située à une distance de notre maison telle que c’est tout bénef : assez loin pour ne pas se faire inonder en cas de fortes pluies, assez près pour que je puisse m’endormir à son roucoulement apaisant.

Plus bas, c’est la maison de ma grand-mère. En bonne Polynésienne, celle-ci se passionne pour toutes les sortes de plantes, fleurs, fruits, et son bout de terrain constitue un charmant cocon naturel et exotique. J’ai d’ailleurs pris la plupart des photos de cet article là-bas.
Quant à mon grand-père, il a depuis quelques temps investi le bungalow plus haut sur la colline.

A part ça, c’est la jungle.

Ce qui signifie que je peux chanter sans peur de ne me faire entendre par les voisins. Sortir de la douche à poil si j’ai oublié de prendre ma serviette (mais seulement quand ma mère et ma sœur ne sont pas là, parce qu’en vrai je suis super pudique). Et même me balader dans la forêt à poil, si je veux, mais alors là j’y vois pas trop d’intérêt.

Maintenant que j’y pense, je l’ai déjà fait (oups !). Mais juste une fois et vite fait : un jour que je m’étais un peu plus enfoncée que d’ordinaire dans les bois, sous la chaleur de fin de matinée, la rivière m’avait fait de l’œil.

Il y a les poules et les coqs qui chantent successivement et très précisément à : 16h, heure du coucher – 23h, heure du p’tit creux de minuit – 4h, heure du lever – 5h, heure du lever des traînards.

Il y a les margouillats avec qui tu échanges de longs et profonds regards dans les cabinets (ou qui décident de te larguer une jolie crotte odorante sur la tête, comme ça, pour le fun).

Il y a mes trois petites chiennes qui font la tournée de nos différentes maisons au petit-déjeuner (tu m’étonnes que mon bichon ait pris du bide !) et le chien du voisin qui nous rend visite à 21h, à l’improviste, parce qu’il passait dans le coin.

Il y a les promenades jusque tout en haut du quartier, sur le terrain vague qui surplombe l’île et dont tu profites encore plus en pensant qu’un jour, il y aura des gens qui viendront s’y installer, d’autres qui grignoteront petit à petit la forêt, et que ce ne sera plus jamais pareil…

Vivre chez Mowgli, ça a ses inconvénients aussi, forcément. Cf. les coupures d’eau et de courant de manière totalement random. Cf. la galère pour expliquer aux copines comment accéder au quartier, et non tu ne peux pas monter jusque chez moi si tu n’as pas de 4×4, de toute façon il n’y a pas assez de place dans le garage, donc tu t’arrêtes chez ma grand-mère, c’est juste après le palmier là… Cf. LES MOUSTIQUES.

Mais, globalement, je me sens très chanceuse d’habiter ici. C’est l’endroit idéal pour la casanière/aspirante écrivaine que je suis, à moins que ce ne soit justement ce lieu de vie qui m’ait forgée ainsi ?


7 réflexions sur “Dans mon jardin

Laisser un commentaire